dimanche 16 novembre 2008

Moi mon remords ce fut...

Qui ne connaît ces moments où l'on a parfois le sentiment de passer à côté de quelque chose d'important ? Mauvais timing, mauvaise appréciation, lâcheté, maladresse, paresse, pour des tas de raisons, bonnes parfois, mauvaises le plus souvent, on n'est pas là quand il faudrait.
Lundi, coup de fil sur mon portable :
- Allô ... ? C'est Nicole (une amie dont je n'avais pas eu de nouvelles depuis plus d'un an).
- Nicole ! Ça me fait vraiment plaisir de t'entendre, mais là, je suis à mon boulot, je peux te rappeler ?
- Oui, si tu veux. Je suis encore à Toulouse mais je rentre ce soir à L-R (sa maison dans les Pyrénées), tu as toujours le numéro ?
- Oui, je l'ai, je te rappelle plutôt vendredi, je ne travaille pas. Ça va, toi ?
- Ecoute, désolée de ne pas t'avoir appelé plus tôt mais j'ai un cancer du sein, j'ai été opérée et là, je suis à l'hôpital pour mon traitement.
- Oh ! [...]
Nicole et moi, on se connaît depuis plus 25 ans. Elle m'a prise sous son aile quand je suis arrivée à Toulouse pour mon travail, j'étais alors une très jeune femme, je ne connaissais personne. Nous avions pile dix ans d'écart. Elle, elle avait un job à responsabilité dans un monde très macho, elle était divorcée et élevait seule sa fille de 6 ans. Elle était brillante, avait du charme, plaisait aux hommes, sortait beaucoup et m'entraînait dans son tourbillon. Nous allions parfois skier ensemble, elle m'a fait connaitre la région, des gens, bref, je lui dois beaucoup. Quand je suis partie à Paris, nous avons continué à nous voir régulièrement chaque fois qu'elle y venait pour affaires ou que moi je descendais la voir chez elle. Plus tard, elle s'est remariée, a eu un fils, une petite-fille et a continué à m'appeler une à deux fois par an. C'est tout ça qui m'est revenu à la figure alors que je raccrochais.
Vendredi, j'ai rendez-vous chez le coiffeur, je suis pressée. Dans la rue, un "couple homme-chien "couché sur le trottoir. Chez nous aussi, ça existe... C'est le chien qui attire le premier mon regard, peut-être parce qu'il est noir et de la taille du mien. Et puis, je regarde l'homme, recroquevillé, le dos agité par des soubresauts. Quand j'arrive à sa hauteur, je m'aperçois qu'il sanglote. Les gens passent, indifférents ou vaguement troublés. Je veux rebrousser chemin pour lui parler mais mon portable sonne à ce moment. J'hésite à répondre. C'est ma mère. J'oublie l'homme. Puis y repense pendant que je me fais coiffer. Une heure plus tard, je décide de repasser par le même chemin. L'homme et le chien ont disparu...
L'après-midi même, comme je le lui ai promis, je rappelle Nicole. Toute petite voix.
- Je te dérange, tu dormais ?
- Non, c'est pas ça mais j'ai fait une chimio mercredi et là, je suis vraiment pas bien. Tu peux me rappeler la semaine prochaine ?
Je la rassure, bien sûr que je vais le faire. Et je me retrouve comme une idiote, mon téléphone à la main, avec mes regrets et mes remords. Deux rendez-vous manqués ...

8 commentaires:

bricol-girl a dit…

Et là on se sent mal, très mal...allez une tisane de réconfort!

Anonyme a dit…

Là , je te comprends , quelquefois on se donnerait des baffes .

Simplement ... a dit…

Combien de "j'aurais dû" manqués pour chacune d'entre nous.
Combien de regrets inavoués.
Pourquoi ? Surtout pas de l'indifférence, mais plutôt cette drôle de vie qui nous pousse ...
Rappelle ton amie dès que ce sera possible, et tout ira mieux.
Bisous du coeur.
Marie-Ange

Anonyme a dit…

Le remords, c'est sans doute l'une des choses les plus dures à dire qui soient...

(J'ai cherché sur Internet quel écho éveillait en moi ton titre... Et j'ai retrouvé : la référence faite par Pompidou à Eluard dans l'affaire Russier).

Anonyme a dit…

Bon courage à ton amie. Une énorme pensée pour elle et pour toi qui va très certainement la soutenir avec tes mots d'amitié.

Anonyme a dit…

- A toutes : merci pour ces petits messages, je me doutais que ça ferait écho à plusieurs d'entre vous ...
- A Karmara : je pensais plus au poème d'Eluard écrit pour les femmes tondues à la Libération. Mais tu as raison, elle a aussi été citée par Pompidou lors de l'affaire Russier qui a inspiré le film Mourir d'aimer.
- A Lakevio : merci pour elle et ...bonne fête à toi !

Anonyme a dit…

Des remords, on en traine tous dans nos besaces...

Anonyme a dit…

Nous en avons tous, nous les accumulons, et le temps est sans pitié, il poursuit sa course, n'offrant jamais la possibilité de rejouer la partition; mais tout peut se réparer, se reconstruire, surtout quand on a le coeur à l'ouvrage.