dimanche 29 mars 2009

Un certain regard

Elle s'appelle Henriette et j'ai la chance de la connaître. La première fois que je l'ai vue, c'était en 1990 à Paris, à la Grande Arche de la Défense, à l'occasion de la remise des prix du World Press Photo. Nous avions parlé de Salgado, je m'en souviens. Elle m'intimidait un peu, auréolée du prestige d'être, en plus d'une grande amie de ma belle-famille, une photographe très talentueuse. Depuis, nous avons eu l'occasion de la recevoir à la maison quand elle est venue animer un stage au club-photo de BrB, puis d'être à notre tour reçus par elle, dans son superbe appartement lyonnais plongeant sur la Saône. Curieuse vie que celle d'Henriette. Aînée d'une famille de huit enfants, elle ne s'est jamais mariée. Un peu comme la Céline de la chanson de Hugues Aufray, il y avait toujours trop à faire dans la grande maison du quartier de la Duchère avec tous ces petits frères et sœurs, comme dans l'atelier familial de jouets en bois où elle secondait ses parents. Quand celui-ci a fermé, elle s'est retrouvée à 30 ans, sans bagages et sans boulot. C'est presque par hasard que, dans la mouvance post-soixante-huitarde des maisons de la jeunesse, elle en est venue à enseigner la photo. Un métier devenu passion au fil des ans et des voyages, Portugal, Bénin, Mexique, Inde et jusqu'aux lointaines Iles Loyauté. Jamais de photos volées chez Henriette, elle partait un mois, sac à dos, logeant chez l'habitant, l'apprivoisant peu à peu et, quand enfin elle se sentait adoptée, elle sortait son Leica et obtenait de magnifiques portraits dont elle n'omettait jamais d'envoyer un tirage une fois rentrée chez elle. Tirages qu'elle faisait elle-même des heures durant dans son atelier, sur papier baryté, le seul à trouver grâce à ses yeux. Cela a donné plus tard quelques belles expos que nous avons eu l'occasion de découvrir et dont le sujet de prédilection était presque toujours, les femmes et les enfants. Aujourd'hui, j'ai revu Henriette. A près de 80 ans, elle vient de se mettre au numérique et bien sûr, de traiter elle-même ses photos avec la dernière version pro de Photoshop. Celles-ci ne connaitront probablement jamais la cote d'un Boubat, son maître, mais elles sont le reflet de l'art d'une femme exigeante, passionnée et passionnante.

samedi 21 mars 2009

Habemus Papam, hélas...

Urbi et Orbi, je vous le dis : en tant que chrétienne et pratiquante bien que moins assidue qu'il y a quelques années, je refuse de continuer à être représentée par un Pape avec lequel je suis en total désaccord. Qu'il m'excommunie, qu'il me voue aux gémonies mais que cesse cette hypocrisie ! Ma voix isolée peut prêcher dans le désert, si nous sommes nombreux à manifester notre désaccord, peut-être pourrons-nous changer les choses ? Je trouve bien que des hommes politiques comme Alain Juppé qui se dit lui-même "attaché aux valeurs chrétiennes", montent au créneau pour dénoncer l'autisme du souverain pontife. Quand Benoît XVI a succédé à Jean-Paul II, dont les prises de position surtout vers la fin de son sacerdoce frisaient déjà ce même autisme, il ne m'avait pas échappé qu'il était le Cardinal Ratzinger. En tant que gardien de la Doctrine de la Foi, il était déjà le chef de file des conservateurs du Vatican. Penser qu'il allait s'amender en devenant pape aurait été illusoire. Tout ce qu'on pouvait se dire, c'est qu'à 78 ans et malade, il ne serait qu'un pape de transition, et se garderait de produire trop d'encycliques. Las, rappelons les faits. Il crée d'abord la polémique en annonçant la levée de l'excommunication de quatre évêques intégristes dont le Britannique Mgr Richard Williamson, négationniste de la Shoah, rien que ça. Puis, il y a l'affaire de l'excommunication au Brésil de la mère de cette fillette de 9 ans (!), enceinte de jumeaux à la suite d'un viol et des médecins qui ont pratiqué l'avortement. Le viol sur enfant (l'inceste dans ce cas) est moins grave que l'avortement thérapeutique ! Je sais, ce n'est pas le Pape qui a prononcé l'excommunication mais le Vatican a soutenu l'évêque brésilien qui en était responsable. Là, j'étais déjà révoltée et voici que survient les déclarations aussi dangereuses que fausses sur le préservatif et sa soi-disant responsabilité dans la propagation du virus du sida. Trop c'est trop. Où est le message d'amour du Christ, là-dedans ? L'Eglise Catholique a déjà fait beaucoup de mal dans les siècles passés au christianisme. J'aurais espéré qu'au 21è siècle, elle soit mieux inspirée. Jésus a dit : "Heureux les affligés car ils seront consolés". Maigre consolation ...

vendredi 13 mars 2009

J'ai rendez-vous avec vous

En toute franchise, ces derniers jours j'en avais un peu assez d'écrire mes petits billets et de venir lire ceux des autres. J'ai donc fait une pause. Et puis, tout à coup, il m'est arrivé un drôle de truc. C'était là, comme une évidence, vous me manquiez. L'une d'entre vous - elle se reconnaîtra - écrivait récemment : "Lorsqu'on parle de blogs à des personnes qui ne sont pas du "sérail", on sent bien qu'elles ne comprennent pas et que, limite, elles nous prennent pour des illuminés. Parfois, on se retient de citer ce qu'on a lu dans un blog [...] Difficile de faire entendre que les faits relatés sont aussi dignes d'estime que s'ils avaient été narrés de vive voix par un proche". Moi aussi, je m'étais trouvée une autre famille et après être restée une semaine sans lui rendre visite, j'étais en manque. Inexplicablement, inexorablement en manque. Depuis un an, je suis en effet une vingtaine d'entre vous et, de fil en aiguille, vous m'êtes devenu(e) s plus proches que certains de mes proches. Je ne connais de vous qu'un prénom, parfois juste un mystérieux pseudo, j'ignore où vous habitez, ce que vous faites dans la vie mais j'ai accès à vos joies, à vos peines, à vos déceptions, à vos humeurs, à vos colères. Prenons cette semaine. Aux deux extrémités de la vie, j'ai appris que l'une d'entre vous attendait le bébé de l'espoir tandis qu'une autre veillait sa maman âgée clouée sur un lit d'hôpital. Je me suis réjouie avec telle jeune amie blogueuse qu'elle ait enfin vu sa BD publiée. J'ai lu avec émotion les mots pudiques que telle autre livrait sur une enfance qu'on devinait douloureuse. J'ai souri à la lecture de la dernière provocation d'un homme sage, et j'ai réfléchi à l'éducation que je donnais à mes enfants grâce à deux oisons du square des Batignolles. L'une de vous m'a touchée aux tripes en expliquant comment elle essayait de rendre la mémoire défaillante à sa maman en reconstituant sur un cahier le puzzle de sa vie. Je suis partie en Inde, j'ai lu un magnifique poème anglais qui parlait de jonquilles, des jonquilles peut-être cueillies dans le jardin d'une dame du Sud...
Je partage vos lectures, vos recettes de cuisine, vos coups de cœur sur une exposition, une pièce de théâtre, je ris à vos saillies, je pleure à vos malheurs, j'applaudis à vos coups de gueule. Et ce soir, comme une certaine longue dame brune, j'ai envie de vous dire : je vous remercie de vous.

dimanche 8 mars 2009

Je vais bien, ne t'en fais pas

Rassurez-vous, je n'ai pas été aspirée par un OVNI, d'ailleurs je n'habite pas près de la Cathédrale de Reims, et je ne suis pas non plus la copine avec laquelle B. est partie à Goa. La dernière fois que nous nous sommes vues, elle n'avait pas encore chaussé ses pataugas, c'était au vernissage de l'exposition Clotilde Vautier dont j'ai déjà parlé . C'est plutôt le temps qui m'a aspirée. Exceptionnellement, j'ai travaillé ces deux derniers vendredis même si c'était en dehors de l'agence et intéressant d'un point de vue professionnel. De son côté, Zuzu remplit son dossier post-bac et chaque samedi, nous allons à des portes ouvertes afin de préparer son avenir. Ceux et celles qui sont passés par là savent ce que cela représente ...
J'ai tout de même eu le temps de faire un petit tour du côté du Musée des Beaux-Arts pour découvrir un artiste inclassable, Luc-Olivier Merson (1846-1920) dont l'œuvre prolifique va de la numismatique (le billet de 100 francs d'avant-guerre, c'est lui) à la philatélie, en passant par l'architecture (l'Escalier des Fêtes de l'Hôtel de Ville de Paris, encore lui) et des tableaux de commandes. Un peintre éclectique dont un critique d'art dit qu'il n'était ni réaliste, ni impressionniste, ni platement académique. Pompier est ce qui vient à l'esprit quand on découvre son œuvre mais le terme semble tout à coup réducteur et péjoratif lorsque l'on fait face à son incroyable "Repos pendant la fuite en Égypte" prêté par le Musée de Boston le temps de l'expo. Certes, on n'est pas obligé d'aimer mais ça ne laisse pas indifférent. Bonne semaine à ceux qui passent et un conseil, ne vous laissez pas happer par le quotidien...