mardi 10 mai 2011

Génération Mitterrand

Le 10 mai 1981, c'était la première fois que je votais pour élire un Président de la République. Je travaillais alors à La Rochelle comme agent de comptoir (!) non pas dans un bar mais dans une agence de voyages, celle du journal Sud-Ouest. A l'époque, la plupart des groupes de presse avaient leur agence, peut-être une façon d'ouvrir leurs lecteurs à de nouveaux horizons. L'agence était au rez-de-chaussée avec la publicité et les petites annonces, et la rédaction au premier. En 81, j'étais encore sous l'influence politique de mes parents et, contrairement à mon frère et à la plupart des gens de ma génération, voter à gauche n'allait pas de soi pour moi. Au premier tour, j'avais voté pour Michel Crépeau qui se présentait pour le MRG (Radicaux de gauche) surtout parce qu'il était maire de La Rochelle et que grâce à lui (et surtout au rédac'chef du journal), j'avais eu droit à un F2 dans une HLM de la ville (on voit où se logeait ma conscience politique ...).  Bref, le jour du second tour, je ne me souviens plus des circonstances de mon vote mais clairement que j'avais hésité à donner ma voix à Mitterrand que je n'aimais pas beaucoup. Pour moi il était vieux (l'âge légal de la retraite aujourd'hui), je me méfiais de son sourire carnassier, ses mines florentines, et ses discours sibyllins. Mais comme beaucoup de Français alors, je supportais encore moins Giscard, son arrogance, son côté bling-bling et ses promesses non tenues (tiens, tiens, ça me rappelle quelqu'un ...). Bref, ce 10 mai à 20 heures, j'étais devant la télévision de la rédaction avec mes collègues et quelques Rochelais lorsque le visage de "Tonton" est apparu. Ceux qui ont vu cette image se souviennent peut-être que les deux candidats étant également dégarnis, il a fallu arriver aux sourcils pour qu'on comprenne que la France venait de changer de bord. En quelques minutes, les quais ses sont couverts de badauds, les rues ont résonné des klaxons des voitures (La Rochelle, ville touchée au début des années 80 par 10% de chômage, votait largement à gauche) et avec mes copines, j'ai observé du balcon la liesse populaire. Plus tard, Crépeau est arrivé au journal avec une caisse de champagne (entre les deux tours, il avait logiquement appelé ses électeurs à donner leurs voix à Mitterrand) pour fêter l'événement. On notera au passage le devoir de neutralité d'un grand quotidien régional... Et vous, votre 10 mai 81 ?

mardi 3 mai 2011

Le bonheur c'est simple comme ...

Dimanche, j'ai acheté mes premières pivoines sur le marché des Capucins. Ceux et celles qui me connaissent bien savent que ce sont là mes fleurs préférées. Les pivoines et les roses anciennes. Ce matin, juste après la signature chez le notaire, nous sommes retournés dans notre nouvelle maison. Jusque là, nous ne l'avions vue qu'en hiver et cette fois, dans le jardin minuscule les rosiers étaient en fleurs. J'ai reconnu un David Austin d'un rose très pâle, presque décoloré, j'avais le même dans notre maison près de Rennes. Hélas, quand j'ai voulu en cueillir quelques fleurs pour rajouter à mon bouquet, les pétales sont tous tombés. Les deux autres rosiers, l'un d'un beau rouge carmin et l'autre d'un rose presque fushia, se sont montrés plus généreux. Sitôt rentrée chez moi, j'ai mêlé les roses aux pivoines et mis le tout dans un joli vase en opaline rose nacré, cadeau de ma sœur chérie déniché aux puces de St Michel. J'étais d'humeur chagrine ces jours derniers, ou plutôt inquiète. Ou les deux. Bref, envie de rien, pas d'écrire en tout cas, juste quelques petits mots laissés sur mon mur Fessebouc, comme des petits cailloux semés pour rassurer mes amis de passage. Un peu la flemme aussi. Et pourtant, le déménagement est dans à peine dix jours. Les cartons attendent ! Mon homme qui est à l'extérieur toute la journée va encore trouver que je n'avance pas vite et franchement, comment lui donner tort ?  En même temps, j'ai l'impression que ma vie depuis trois ans n'est qu'une succession de déménagements (et de fait, elle l'est !), je rêve de pièces vides la nuit et je me réveille en transes persuadée que rien n'ira dans rien. Le quotidien m'ennuie, le futur m'affole, quant à la rumeur du monde, parlons-en. Allumer la radio ou regarder la télé me filent le bourdon, entre les bons pères de famille massacreurs de vies,  les dictateurs déchus et ceux qui s'accrochent, les images d'attentat, tout ce sang partout, et maintenant,  le visage tuméfié - vrai ou faux - de l'homme le plus recherché du monde qu'on ne cherchera plus, stop ! C'est quand le bonheur ? Voilà, mon petit bonheur à moi, aujourd'hui à cette heure, ce sont ces roses et ces pivoines. La vie, et rien d'autre.